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Chirac admiré, Sarkozy réprimandé... Quand les présidents français rencontrent Vladimir Poutine

Vladimir Poutine et Jacques Chirac

Vladimir Poutine et Jacques Chirac - OLIVIER LABAN-MATTEI / AFP

Ce lundi, Emmanuel Macron se rend à Moscou pour y rencontrer Vladimir Poutine. Avant lui, ses prédécesseurs ont entretenu des relations plus ou moins apaisées avec leur homologue russe.

Ce lundi, Emmanuel Macron se rend à Moscou pour rencontrer Vladimir Poutine. Un voyage officiel s'inscrivant dans les intenses tractations diplomatiques actuellement en cours, visant à éviter une invasion russe sur le territoire ukrainien.

À la tête de la Fédération de Russie sans discontinuer depuis le 31 décembre 1999, à l'exception de 2008 à 2012 où il a brièvement passé le flambeau à Dmitri Medvedev, Vladimir Poutine a vu défiler trois présidents de la République française avant l'élection d'Emmanuel Macron en 2017. Avec lesquels se sont déroulées des rencontres cordiales parfois, tumultueuses souvent. BFMTV.com revient sur près de deux décennies de rencontres franco-russes.

• Jacques Chirac, un président admiré de Poutine, au "savoir encyclopédique"

Le 30 septembre 2019, Vladimir Poutine est le seul dirigeant d'une grande puissance présent aux obsèques de Jacques Chirac. Une présence remarquée, qui témoigne de l'admiration qu'a vouée l'homme fort du Kremlin à l'ancien président.

Mais quand il arrive au pouvoir le 31 décembre 1999, Vladimir Poutine préfère rester prudent vis-à-vis de la France et de son président. En cause, les critiques françaises concernant la guerre en Tchétchénie. Pourtant, Jacques Chirac, arrivé au pouvoir en 1995, est féru de culture russe, et entretenait jusqu'alors de bonnes relations avec le prédécesseur de Poutine, Boris Eltsine. C'est en septembre 2000 qu'a finalement lieu la première rencontre entre Vladimir Poutine et Jacques Chirac, lors d'un déjeuner à l'Elysée.

L'ambassadeur Claude Blanchemaison, ambassadeur de France en Russie de 2000 à 2003, se souvient, dans les colonnes du quotidien La Croix, de cette première rencontre, et la relation de confiance qui s'est installée par la suite.

"Vladimir Poutine a joué le rôle du jeune politique venu chercher des conseils auprès d’un homme dont il voulait savoir comment il avait duré si longtemps au sommet", se souvient Claude Blanchemaison. "Jacques Chirac se prêtait au jeu de bonne grâce. Ils ont noué des relations de confiance et d’estime qui se sont consolidées avec le temps".

Par la suite, Vladimir Poutine n'hésitera pas à couvrir d'éloges son homologue français. En 2015, revenant sur les échanges qu'il a eu avec Chirac concernant leur décision de ne pas soutenir les Etats-Unis en Irak, il a évoqué l'ancien président comme possédant "un savoir encyclopédique".

"Chirac, qui a des relations proches, intimes avec la partie sunnite du Moyen-Orient - d'ailleurs, il possède un savoir encyclopédique -, avait déjà prévu ce que provoquerait cette guerre", avait estimé Vladimir Poutine.

Puis en 2019, dans le quotidien britannique Financial Times, Vladimir Poutine avait cité Jacques Chirac comme dirigeant occidental qu'il admirait le plus, évoquant un "vrai intellectuel, un professeur, un homme pondéré et intéressant".

• Sarkozy K.O debout après sa rencontre avec Poutine

En 2007, le G8 se déroule à Moscou. Fraichement élu, Nicolas Sarkozy est va-t'en guerre concernant sa rencontre en tête-à-tête avec Vladimir Poutine. Mais à la conférence de presse qui suit cette entrevue, Nicolas Sarkozy apparaît groggy. Les journalistes de l'époque imaginent alors qu'il est alcoolisé. Problème, Nicolas Sarkozy ne boit pas.

Dans un documentaire diffusé en 2016 sur France 2, intitulé Le mystère Poutine, le journaliste Nicolas Hénin déclare que l'entrevue a en réalité été particulièrement difficile pour Nicolas Sarkozy. Souhaitant évoquer les dossiers de la Tchétchénie, d'une journaliste assassinée et des droits des homosexuels, l'ancien président de la République se montre très sûr de lui face à Vladimir Poutine.

Face à ces propos, et toujours selon Nicolas Hénin, Vladimir Poutine répondra: "Alors maintenant, de deux choses l'une. Ou bien tu continues sur ce ton et je t'écrase. Ou alors tu arrêtes de parler comme ça et tu verras. Tu viens juste de devenir président de la France mais je peux faire de toi le roi d'Europe", lui aurait-il lancé, dans un discours ponctué d'insultes et de propos humiliants. 

• Hollande et l'intense nuit de tractations à Minsk

En février 2015, et aux côtés d'Angela Merkel, François Hollande se trouve dans le palais de la République, à Minsk en Biélorussie. Face aux deux dirigeants européens se font face le président ukrainien de l'époque, Petro Porochenko, et Vladimir Poutine. L'objectif de cette rencontre, qui débouchera sur l'accord de Minsk II, est de décréter un cessez-le-feu dans le cadre de la guerre du Donbass, qui oppose des séparatistes ukrainiens pro-Russes soutenus par Moscou, et les forces loyalistes ukrainiennes.

Dans un entretien accordé à l'hebdomadaire Le Point, François Hollande est revenu sur cette rencontre. Il se souvient de discussions particulièrement tendues, qui ont duré toute la nuit.

"La nuit a été hachée par des suspensions de séance et heurtée par plusieurs attaques verbales, toujours les mêmes, de Poutine à l'égard de Porochenko. Il cherchait à gagner du temps pour que le cessez-le-feu intervienne le plus tard possible et que les séparatistes consolident leurs positions", se rappelle l'ancien président de la République.

Vladimir Poutine refuse d'abord de signer l'accord-cadre, avant que la situation se dénoue d'un coup, après un coup de téléphone passé par le président russe.

Pour François Hollande, toujours dans Le Point, Vladimir Poutine est "très conscient du personnage qu'il joue, et de la peur qu'il peut inspirer". Puis d'évoquer un homme "froid dans ses intentions et cynique dans ses méthodes".

Jules Fresard